Tuesday, January 02, 2007

Les soleils éteints

Je me suis étonné que mon ami L'hareng Goret et moi soyons si proches étant donné les différences qui composent nos deux bibliothèques. Nous ne lisons pas la même chose, lui ai-je fait remarquer. Lui : Stephen King, Onfray, San A., Hugo, le tout sous le regard de commandeur de l'idôle Ferré. Moi : les hussards, Djian, Schoendoerffer, Quignard, sous les chansons de Nougaro. "J'ai quand même quelques Déon", m'a-t-il répondu. J'ai vu une poignée de livres de poche dans un angle caché. Mes Déon occupent tout un étage de ma bibliothèque, et ils l'occupent seuls. Et c'est l'étage le plus noble. Sur deux rangées. Plus les beaux livres de voyages illustrés. Et les oeuvres préfacées ou communes.
Il y a peut-être une quinzaine de jours a paru un article dans le Monde littéraire sur Déon, au sujet du recueil de certaines de ses oeuvres. Cet article m'a marqué à deux titres :
1/ Josyane Savigneau, qui est un peu Madame le Monde littéraire, ne m'apprend rien, et ne semble rien apprendre elle-même sur l'homme ni même sur l'écrivain. L'interview rabache les mêmes clichés que Déon se traîne depuis ses vingt ans. L'Action Française pendant la guerre ; les Hussards réunis malgré eux sous le prétexte d'aimer les femmes et les voitures de sport, et d'écrire pour le plaisir avant tout ; le scandale des Poneys Sauvages quand le Goncourt lui fut refusé, et la mauvaise foi des détracteurs à sa sortie ; l'engagement politique ; le monarchisme ; l'Irlande et la Grêce. Ca valait la peine. Depuis que je lis des articles sur Déon, je n 'ai jamais rien appris.
2/ Cet acharnement des journalistes à ne rien sortir de neuf sur l'homme ni sur l'écrivain me gène. Ca me gène parce que c'est comme si Déon l'acceptait. Comme si le ronron de ces éternels clichés l'avait vaincu. Comme si le hussard libre et sabreur avait jeté l'épée, mis à terre par la roue lancinante et puissante d'une presse qui se satisfait vite des portraits prémâchés. Même Savigneau.
Et puis j'ai repensé au recueil. Il est précédé d'un commentaire de l'auteur sur le contexte dans lequel fut écrite chacune des oeuvres reprises. Et conclu par une biographie signée de sa fille. Où il est quand même question des prises de position politiques de son père pendant la guerre. Certes le contexte nous empêche de juger, et certes les intentions étaient louables. Mais dire "les intentions étaient louables" revient à dire "il a fait de belles erreurs quand même". A la fin, je ne veux plus l'ignorer.
Alors j'ai repensé à tout ça en une fraction de seconde lorsque L'hareng m'a montré son rayon Déon. Tout s'est synthétisé en une seconde. Un peu amer j'ai dit : "Déon, je m'en éloigne de plus en plus." L'hareng m'a répondu : "Ca me fait pareil avec Ferré".
A part ça, je relis Nimier.

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